6 manières de découvrir le mode de vie dans l’Athènes d’autrefois

Cafés traditionnels

La première étape de votre visite dans l’Athènes d’autrefois vous emmènera dans l’un (ou plus) des nombreux kafeneia (cafés), abritant à eux seuls toute l'âme de la ville. Apparus pour la première fois à l'époque ottomane, ils sont devenus le meilleur moyen de prendre le pouls de la société athénienne. Chaque quartier de toute ville ou village grecs se respectant, possède ses propres kafeneia, où les habitants aiment s’attarder. À Athènes, et cela jusque dans les années 1980 - 1990, chaque coin de rue avait son kafeneion, et vous pouvez encore trouver des cafés traditionnels qui fonctionnent depuis des décennies (certains depuis plus d'un siècle), s’attachant à préserver traditions, convivialité et ambiance d’autrefois. Cette atmosphère si caractéristique est accentuée par les vieilles mosaïques et peintures, les portraits et les photographies anciennes tapissant sur les murs. Certains cafés affichent même parfois des documents historiques, exposent des objets de famille et des vieilles publicités.

D’autres cafés d’Athènes, plus récents, choisissent délibérément d'adopter ce caractère vintage. Des chaises en bois, des petites tables dans un décor simple, et même du café grec sti chovoli (on le prépare sur des cendres chaudes plutôt que sur le feu), servi avec des loukoumakia (confiseries enrobées de sucre glace similaires aux loukoums turcs). En fin d’après-midi, le café est alors remplacé par un verre d'ouzo, de tsipouro, de bière ou de vin, toujours accompagné d'un mezzé tout simple mais délicieux.

Pourquoi les cafés traditionnels d'Athènes sont-ils si importants ? Si vous avez observé la clientèle, il se peut que vous ayez déjà un début de réponse. En effet, autrefois, chaque jour, les kafenia s’emplissaient des ouvriers et employés sortant de leur travail, pour un verre et quelques mezzés, avant de rentrer à la maison, et constituaient également des lieux de rassemblement pour les intellectuels de la ville. Mais vous pouviez simplement y venir pour faire une partie de backgammon ou d’échecs (il y a encore des cafés d'échecs à Athènes !) et exprimer votre opinion sur l’actualité.

Tavernes athéniennes

Tous ceux qui ont visité la Grèce savent ce que signifie de manger dans une taverne authentique. Mais la taverne athénienne traditionnelle est beaucoup plus que les plats qui vous seront servis. À l'origine, les tavernes à Athènes étaient très fréquentées par les travailleurs (souvent des ouvriers) qui s’attablaient à l'heure du déjeuner. Mais dès la première moitié du 20^ème siècle, l'introduction de la musique (idéalement en live) a élevé ces simples lieux de restauration à des lieux incontournables de la vie sociale athénienne.    

Aujourd’hui, on trouve encore des tavernes dans le centre d'Athènes gérées par les descendants des fondateurs du restaurant. Ayant survécu aux guerres, à l’instabilité politique, aux crises économiques et à tous les événements, les tavernes se sont progressivement chargées d’une atmosphère typique et authentique.

La catastrophe de l'Asie Mineure en 1922 a bouleversé les tavernes athéniennes traditionnelles, en raison de l’arrivée de plusieurs centaines de milliers de réfugiés grecs qui se sont installés à Athènes, augmentant considérablement la population de la ville. Originaires des villes d’Asie Mineure, comme Smyrne, où ils avaient l’habitude d’une culture d’ouverture, invitant fréquemment famille et amis à la maison et organisant des fêtes, ces réfugiés, n’ont trouvé à Athènes que de petits logements, à peine assez grands pour leurs familles, et encore moins pour accueillir des invités. Ainsi, l'humble taverne de quartier s’est rapidement transformée en un lieu de plaisir et de musique où pouvaient se retrouver famille et amis autour d’une bonne table. Les instruments du rebetiko, aux sonorités orientales, ont progressivement empli les tavernes, où, avec le temps, un grand nombre de musiciens de rebetiko, parmi les plus importants, se sont fait connaître.

Mais, c’est le propriétaire qui constitue le cœur de la taverne athénienne. Il a toujours eu à cœur d’entretenir une relation personnelle avec les habitués, restant à l’écoute de leurs problèmes et les faisant toujours se sentir uniques, seuls ou accompagnés de leur parea (groupe d'amis). Les tavernes athéniennes ont attiré quelques-unes des plus grandes personnalités intellectuelles et artistiques de l'époque. Et malgré leur succès, le décor et le menu des tavernes sont toujours restés très simples. Les plats étaient servis sti mesi (au milieu) dans le style mezzés à partager entre tous les convives. Le véritable festin résidait dans le bavardage, le rire et les verres qui s’entrechoquent.

Les marchés locaux

Mais vous apprendrez vraiment ce que signifie de vivre à Athènes, quand vous découvrirez la manière dont ses habitants font leurs courses et leurs achats. Et ici, encore une fois, les traditions et habitudes des XIX^ème et XX^ème siècles jouent un rôle central dans l'histoire de l'Athènes contemporaine.

Le marché Varvakios

Emblème de la ville depuis plus d’un siècle, le Varvakios reste un marché de produits frais très animé et constituant le cœur battant de la ville. Ouvert en 1886, il faisait partie d’un projet important de création de quatre marchés à Athènes, s’inspirant des normes des marchés centraux des grandes villes européennes. Finalement, un seul a été créé, du nom de Varvakios (d'après le bienfaiteur Ioannis Varvakis, qui a fondé l’école du même nom, se trouvant en face du marché pendant de nombreuses années).

Les ménagères, soucieuses de remplir leur panier, commençaient leur visite au marché dès le matin, et côtoyaient souvent les noctambules se restaurant avec un bon bol de patsa (soupe de tripes) avant de rentrer à la maison. Le marché de Varvakios comporte des sections réservées aux marchés de la viande et du poisson, bordés d’une myriade de petits commerçants et de marchands de châtaignes, de koulouria (pain bien cuit en forme d’anneau enrobé de graines de sésame), de pois chiches grillés etc.

La zone environnant le marché, proche du quartier de Psirri, a également subi de grands changements par suite de la catastrophe d'Asie Mineure. Ce quartier a toujours été un témoin direct des flux migratoires de la ville. Cependant, il a également connu des périodes de prospérité, grâce à l'ouverture de nouveaux restaurants et à l’organisation de nombreuses fêtes le dimanche à certains moments de l'année. Mais, le cœur du marché Varvakios sera toujours un cœur ouvrier, c’est pourquoi il est si fascinant et intéressant, de jour comme de nuit.

Rue Evripidou

La rue embaumant la ville de ses arômes très caractéristiques ! La rue Evripidou s’étend du marché Varvakios à la place Klafthmonos, en passant par la rue Stadiou, l'une des principales artères du centre d'Athènes. Ouverte à la fin du XIX^ème siècle, dans le sillon du marché Varvakios, elle est devenue le lieu privilégié des bakalika (épiceries) spécialisées dans les herbes et épices, les produits laitiers, les légumineuses, les pâtes et la charcuterie.

Tous ces commerces sont encore représentés dans cette rue emblématique. En effet, bon nombre de commerces de la rue Evripidou ont une histoire remontant à plusieurs décennies, ayant à cœur de toujours préserver l'atmosphère d'époques anciennes. Vous n’y trouverez aucun produit emballé, tout y est vendu en vrac. Faire ses courses dans la rue Evripidou signifie d’acheter au poids, exactement comme au bon vieux temps. Et il vous suffira de respirer les parfums emplissant la rue pour le comprendre.

Marchés de quartier

Il y a environ un siècle (le 18 mai 1929), au son du tambour et en présence du premier ministre de l’époque, on inaugurait l’institution de l’agora laiki (marché populaire) dans le quartier de Thissio à Athènes. Et faire ses courses sur ces marchés demeure encore une part de la routine hebdomadaire pour de nombreux Athéniens.

Au début, quand Athènes était encore une petite ville, chaque quartier disposait de son marché tous les jours de la semaine. Aujourd'hui, chaque quartier d'Athènes accueille son marché hebdomadaire. Pommes de terre, oignons, tomates, artichauts, oranges, kiwis… vous saurez immédiatement quels fruits et légumes sont de saison car vous les verrez empilés sur les étals, tandis que les vendeurs bruyants rivaliseront d’invention pour attirer votre attention. Sur ces marchés fermiers, il ne s'agit pas uniquement de la production des terres grecques... vous y trouverez également des fleurs, des fruits de mer et des articles ménagers à des prix très avantageux.

Place Avissinias

Depuis deux siècles maintenant, l'orient et l'occident se rencontrent sur la place Avissinias au centre d'Athènes. Sur cette place, se tenait autrefois, pendant l'occupation ottomane, un marché central important, dont il reste le bazar qui opère toujours le dimanche matin. Sorte de marché aux puces, des étals en plein air vendent des antiquités de toutes sortes : vieux meubles, vignettes et miniatures qui rappellent l'Athènes d’autrefois, ainsi que des articles en fer forgé provenant de la région qui abritait autrefois de nombreux artisans forgerons. Des marchands de soie, souvent réfugiés d'Asie Mineure, avaient également l’habitude de s’installer sur ce marché. Et alors qu'Athènes prospérait, des objets ménagers « plutôt démodés » y remplissaient les étals, prêts à trouver une nouvelle maison. Si vous vous y rendez, vous constaterez que peu de choses ont changé depuis.

Les magasins d'artisanat traditionnels

Il est très agréable de se promener dans les quartiers du centre d'Athènes et de tomber sur les petites boutiques des artisans des 19^ème et 20^ème siècles. Par exemple, à Psirri (mais aussi dans d’autres quartiers du centre), vous trouverez des commerces vendant des chaises et des meubles artisanaux, ainsi que des cordonniers et des magasins de maroquinerie et leurs articles faits mains. À Exarchia, vous trouverez des commerces vendant des instruments de musique (en particulier des luthiers), d’autres proposent des cadres, ainsi que des reliures, alors que de nombreuses petites et plus grandes maisons d'édition poursuivent leur œuvre (Exarchia était autrefois le quartier des relieurs et des librairies).

L'architecture

Hormis l'Acropole et les sites archéologiques, Athènes est difficilement reconnaissable depuis qu'elle est devenue la capitale de la Grèce au début du XIX^ème siècle. Passée, presque sans transition, du statut de petite ville de province à une métropole géante animée, elle abrite désormais plus de 5 millions d'habitants (près de la moitié de la population de la Grèce). Le développement ininterrompu de la ville a façonné son paysage architectural qui a radicalement changé depuis deux siècles.

Jusqu’au début du XX^ème siècle, Athènes était une ville de contrastes, alternant petites maisons rurales et – en particulier sur les principales artères du centre – bâtiments néoclassiques, vastes demeures familiales ou propriétés d’État, arborant leurs terrasses impressionnantes et d’autres éléments rappelant le style de la Grèce classique.

Sous la pression du développement urbain, les petites maisons rurales, dont on peut voir encore quelques exemples dans les quartiers de Plaka et d’Anafiotika, ont rapidement été remplacées par des immeubles d'appartements. De même, les nombreux bâtiments néoclassiques ayant survécu, nous rappellent comment était la vie dans l’Athènes d’autrefois. Parmi les plus emblématiques figurent le Parlement hellénique sur la place Syntagma (l’ancien Palais Royal du roi Otto et de la reine Amalia édifié en 1836) et le Grande Bretagne (un hôtel de premier plan depuis sa construction en 1842), ainsi que le Palais du Zappéion, à proximité du jardin national (un des sites importants des premiers Jeux Olympiques modernes de 1896). Par ailleurs, l'ancien Parlement sur la rue Stadiou, résidence permanente de la famille royale à partir de 1833, est devenu le siège du Parlement de 1875 à 1935. 

Mais rien n’évoque mieux la grandeur néoclassique que la Trilogie athénienne, comprenant l'Université d'Athènes, l’Académie d'Athènes et la Bibliothèque nationale, sur la rue Panépistimiou. Ces bâtiments impressionnants ont été conçus par deux frères architectes danois, Christian et Theophil Hansen, en collaboration avec l’Allemand Ernst Ziller, né en Saxe, concepteur de la plupart des édifices les plus emblématiques d'Athènes pendant la campagne visant à faire d'Athènes une capitale aux normes européennes.

Parmi les autres joyaux du XIX^ème siècle, on trouve l'ancienne Imprimerie Nationale et le Musée archéologique national à proximité, mais aussi, l'Institut archéologique allemand, le manoir Serpieri, le bâtiment de la Banque nationale de Grèce sur la rue Panépistimiou et le Palais Maximou, construit en 1912 et résidence officielle du Premier ministre de la Grèce depuis 1982.

12 bâtiments historiques d’Athènes pour les amateurs d'architecture

Habitudes quotidiennes et divertissement

Ce voyage, empreint de nostalgie, à travers l’Athènes d’autrefois se termine par un décor teinté de rose dans la capitale grecque, et datant de la fin du XIX^ème siècle au début du XX^ème siècle. En effet, la Belle Époque, période de paix et de relative prospérité dans certains pays de l'Europe avant la première Guerre mondiale, imprégnait également quelques éléments de la société grecque. L'avenue Panépistimiou, reliant la place Syntagma à la place Omonia, était le grand boulevard d'Athènes, qui conduisait les gens vers les différents lieux de divertissement de la ville... des endroits où les Athéniens aimaient danser, discuter de politique et d'art, allaient au théâtre et buvaient des cafés en terrasse... Les premiers kiosques (périptèra) sont alors apparus et les rues débordantes de vie, bruissaient des appels des marchands ambulants et des musiques des laterna (orgues de Barbarie).

Cette ambiance « Belle Époque » a malheureusement été interrompue par les guerres balkaniques dès 1912 et la première Guerre mondiale. Elle a réapparu ensuite dans un style et une vigueur renouvelés. Le célèbre café Zonars (Athénée) a ouvert ses portes en 1939, mais il a atteint son apogée dans les années 1950 et 1960. Des marchands ambulants proposant des châtaignes grillées, des billets de loterie et des koulouria (pain en forme d’anneau) ont bien vite envahi de nouveau les rues. Les pâtisseries sont, elles aussi, devenues des lieux de rencontre, alors que les boites (les clubs) accueillaient les plus grands noms de la musique et du cinéma grecs. Des théâtres sont apparus (tel l’emblématique théâtre Pallas en 1932) et des spectacles de marionnettes Karagiozi du théâtre d’ombre ont surgi, témoignant d’une identité culturelle unique et de plus en plus extravertie. Ce qui est passionnant, après ce portrait du passé de la ville d’Athènes, c’est, en flânant dans ses rues, d’être capable, aujourd’hui, de repérer toutes ces caractéristiques d’autrefois.

6 manières de découvrir le mode de vie dans l’Athènes d’autrefois 

Par quoi avez-vous été le plus inspiré.e lors de cette visite virtuelle dans l’Athènes d’autrefois ? Les cafés et les tavernes ? Ou peut-être les marchés de quartier, les petits commerces d'artisanat et l'architecture ? Quel que soit votre préférence, une chose est sûre… les personnes qui ont embrassé le mode de vie dans l’Athènes d’autrefois, sont prêtes à tout pour le préserver et le transmettre aux générations futures afin de l’intégrer dans l’histoire de l’Athènes contemporaine.

Découvrez les facettes de l'Athènes contemporaine